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Sur les affrontements à Molenbeek: la version de ceux qu’on ne veut pas entendre

Les tensions entre policiers et jeunes à Molenbeek, ce dimanche 18 septembre 2016, ont fait couler beaucoup d’encre. Comme d’habitude, les forces de l’ordre se présentent et sont présentées comme des victimes. Et pourtant, selon les témoignages recueillis, ce sont les policiers qui ont joué le jeu de la provocation en s’en prenant violemment aux habitants du quartier. Et ce n’est pas la première fois. La campagne Stop Répression veut reprendre ici la version de ceux et celles qu’on ne veut pas entendre, des victimes que police, média et politiciens transforment en coupables.

Retour sur les faits

Ce dimanche, peu avant 14 h, plusieurs patrouilles de police se rendent à proximité de la station de métro Beekkant pour effectuer des contrôles d’identité. Une dame présente sur les lieux demande à un agent les raisons d’un tel déploiement policier, ce dernier lui répond de « dégager ». Elle est alors poussée et compressée contre une barrière. Son fils, âgé de 15 ans, intervient et demande au policier de ne pas s’adresser de cette façon à sa mère. On lui dit de « fermer sa gueule », face au traitement réserve à sa mère celui-ci refuse de se taire. Il est balayé et plaqué au sol puis menotté par 3 agents. Son visage est écrasé au sol par les bottes des policiers.
Plusieurs jeunes sur place, ayant assisté à la scène, sont gazés immédiatement avant même qu’ils ne réagissent. Parmi eux se trouve le plus âgé des fils de la dame, il cherche à savoir pourquoi son frère est menotté. Il est arrêté aussi. Les policiers les embarquent. Ils seront inculpés de « rébellion », avec la circonstance aggravante pour le fils aîné de « rébellion armée », il dit avoir seulement jeté une bouteille de soda en plastique en l’air. Cette accusation est sérieuse. Elle n’est pas sans rappeler l’histoire de ce militant no border, condamné pour « rébellion armée » parce qu’il avait une baguette de tambour en plastique de 30 cm dans une manifestation tendue. De façon plus générale, la majorité des avocats qui défendent des victimes de violence policières en témoignent : la police utilise de façon systématique l’accusation de rébellion pour justifier les violences et décrédibiliser les victimes.
Vers 16 h, alors que le calme est revenu, la police « anti émeute » se rend sur place. Les personnes présentes sont matraquées sans ménagement. En ce compris ceux et celles qui demandent à comprendre ce qui se passe ou qui exigent que la police agisse avec respect. C’est à ce moment-là, que la tension monte et que la situation dégénère en affrontements entre les jeunes et la police. Bilan de cette opération policière : trois jeunes sont arrêtés, plusieurs sont blessés dont un grièvement qui a du être hospitalisé.
Le déroulement des événements démontre clairement que les forces de l’ordre ont cherché la confrontation ce dimanche 18 septembre. Que ce soit en déployant un dispositif aussi important, transformant le quartier en zone occupée ou en agissant de manière insultante et violente envers les habitants du quartier, la police a joué la tension. Ceci s’ajoute à un contexte où le harcèlement, les insultes et les violences policières sont de plus en plus fréquents. Ces pratiques policières ne sont en effet pas rares dans ces quartiers qualifiés de « sensibles ». Les habitants du quartier, jeunes comme parents, affirment que c’est quasi quotidiennement qu’ils doivent faire face au harcèlement policier : contrôles au faciès, humiliations, insultes et autres abus.
Il faut rappeler par exemple que c’est dans le même quartier que 5 policiers avaient tabassé et insulté un jeune garçon de 14 ans. Lui aussi a été accusé de « rébellion » par les cinq policiers, malgré le fait qu’il faisait à peine 50 kg à l’époque. Autre similitude, le jeune Moad avait une marque de botte sur le crane. Depuis plus de 3 ans, lui et ses parents demandent justice pour lui, mais aussi « pour tous les autres  qui n’osent pas porter plainte » rappelle sa mère. Le jugement en correctionnelle aura lieu ce 8 novembre, à l’occasion duquel un rassemblement demandant « la justice pour Moad » est prévu.

Racisme et brutalité

Le lundi matin qui suit, la dame de la première agression se rend au tribunal pour assister son fils, mineur. À sa grande surprise, elle se retrouve arrêtée et accusée d’« incitation à l’émeute » pour les événements de la veille !
Les agents qui l’arrêtent sont violents et racistes. En effet, la dame témoigne de plusieurs faits violents : les policiers ont arraché son voile dès qu’elle est rentrée dans la voiture de police en lui disant « on ne porte pas ça chez nous ». Elle n’a pu le remettre qu’une fois relâchée.
Privée de liberté pendant plusieurs heures, elle a été transportée du palais de justice vers un commissariat, puis un autre et s’est fait fouiller par des agents masculins, contrairement à ce qui est prévu par la loi ! Ils ont coupé le cordon de son pantalon et ôté ses sous-vêtements. Lorsqu’elle a e enfin eu droit a un verre d’eau, l’agent présent a renversé son contenu sur le sol en lui disant « tu n’as qu’à lécher le sol ».
Pendant ce temps là, la police refusait de dire à son mari dans quel commissariat se trouvait sa femme, qui voulait lui faire parvenir les médicaments dont elle a besoin.
Et pourtant, alors qu’elle a été violentée à deux reprises, qu’elle est victime de racisme islamophobe ; c’est elle qui se retrouve aujourd’hui sur le banc des accusés.
La montée de l’islamophobie est alimentée par les amalgames entre islam et terrorisme. Le plan canal en est un exemple, en visant les quartiers pauvres et en particulier les quartiers où vivent de nombreux musulmans, les autorités nient les multiples enjeux et besoins de ces quartiers, en choisissant une approche répressive et raciste. Et quand on voit avec quelle violence les forces de l’ordre s’en prennent aux habitants, on comprend qu’ajoutées, à la stigmatisation, médiatique et politique, les insultes et les violences policières de plus en plus « libérées » ne font qu’attiser la colère et approfondir l’exclusion et l’injustice à laquelle les habitants des quartiers populaires bruxellois sont déjà confrontés.
Et ces derniers l’expriment très clairement, ils en ont marre ! Les événements des derniers jours sont apparus comme la goutte qui a fait déborder le vase. Les habitants s’organisent et disent ne vouloir rien lâcher. Ils souhaitent que la situation  change pour « leurs jeunes et tout le monde ». Ils ont la ferme intention de dénoncer ce qu’il se passe de ce côté de Molenbeek, de dévoiler la vérité. Non ce ne sont pas les « méchants jeunes » qui attaquent la « gentille police » comme l’ont prétendu les médias, mais bien une police qui n’a de cesse de les provoquer. La pression que les autorités font subir à ces quartiers signifie une réalité invivable pour ces habitants. Ce dimanche 18 et lundi 19 septembre, cela a été trop loin.
Depuis cinq ans la Campagne Stop Répression, se bat pour qu’on écoute enfin les victimes, pour qu’on cesse la politique du tout au sécuritaire. Nous le disions déjà à l’époque, et d’autres le disent depuis bien plus longtemps, cette vision des quartiers populaires est construite sur le racisme et l’exclusion. Le tout à la police, mène à sa militarisation : aujourd’hui après les gilets par balles et les fusils d’assauts on vaut intégrer flashballs et tasers à l’arsenal. Plus d’armes signifie plus de violence et de tensions.
Les quartiers populaires ont besoins de logements, d’emplois, d’écoles démocratiques, de mettre fin au racisme structurel et surtout qu’on écoute enfin ce que ces habitants. e. s jeunes et vieux ont à dire. Les quartiers ont besoin d’innombrables choses, mais pas de cowboys et de racistes !
Justice et vérité pour toutes les victimes !

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